Les enjeux patrimoniaux, stratégiques, pédagogiques et économiques
Respect d’une tradition.
Traditionnellement le Pays de Bray est terroir de pommiers, vaches laitières Normandes et lait, Neufchâtel, cidre et Calvados, viande bovine, autres produits laitiers exportés vers Paris, passage des “chasse marées” qui acheminent vers la capitale le poisson péché dans la nuit.
Zone d’herbages et de bouveries, le Pays de Bray alimente le Bassin parisien, sur les marchés locaux s’échangent les denrées issues de ce terroir propice au lait, crème, beurre, œufs, viande, et les incontournables Neufchâtels et petits suisses.
Réfléchie par l’association pour “coller” à l’agriculture du pays de Bray
Conscients de cette richesse patrimoniale qu’offre encore le Pays de Bray dans ces années 1980 les membres fondateurs proposent que la ferme en prenne le parti, et font le pari de produire du lait avec un troupeau de Normandes, de transformer ce lait en fromage local, le Neufchâtel, de planter des pommiers de pommes à cidre. Objectif : respecter et mettre en avant les productions locales, travailler à la régularité de ces produits en mettant à la tête des ateliers des responsables impliqués.
Des professeurs impliqués
1982 : L’Association du Domaine de Merval est officiellement créée. Aussitôt les membres fondateurs convainquent les agriculteurs qui louent les herbages de s’en dessaisir au profit de l’avènement du futur lycée agricole.
1983 : embauche du premier salarié agricole.
1984 : Yves Bégué, professeur de zootechnie à l’école d’agriculture de Gournay en Bray sillonne la Normandie et achète sur les finances de l’association des petites génisses Normandes à l’origine du troupeau actuel. Dans le même temps, Christophe Tardivon, professeur d’agronomie plante avec les élèves les premiers pommiers sur les terres de Merval .
1989 : première rentrée scolaire: état des lieux.
Septembre 1989, première rentrée scolaire dans les travaux… Les cours ont lieu dans les sous sols des pavillons d’internat, le château étant toujours en rénovation. Mais à la ferme : 60 vaches Normandes produisent du lait, une vingtaine de bœufs pâturent, et dès octobre les élèves récoltent les premières pommes qui seront transformées en cidre et Calvados. La fromagerie attendra un peu…
1994 : premier Neufchâtel AOP à Merval.
Il faudra attendre 1994 pour que la fromagerie voie le jour : Aménagements de l’atelier dépendant des services sanitaires, pressions des producteurs… Bien des turpitudes à gérer, mais 5 ans après l’accueil des premiers élèves, les fromages sont produits. Les marchés sont rares, le fromage du Pays de Bray est produit et vendu… en pays de Bray.
D’où recherche de nouveaux marchés, de clients “hors zone” Et ça fonctionne !
Et la cidrerie, alors ?
Le verger est jeune et ne produit que peu de pommes, aussi des membres fondateurs et amis offriront les fruits de leurs vergers (pendant des années une cuve portera au feutre indélébile le nom d’André Caron, premier président de l’association)
Reconnaissons, concernant le cidre, que la réussite n’est pas toujours au rendez-vous, mais au fil du temps les assemblages et la technologie évoluent favorablement.
Le Calvados, épopée en Pays de Bray portée par Merval.
1989 toujours : production d’un peu de cidre, le solde est distillé. Eau de vie agréable, équilibrée. Nous nous rapprochons de l’INAO (Institut National des Appellations d’Origine) pour faire accepter ce spiritueux en appellation Calvados. Las… L’INAO nous apprend que l’AOC (Appellation d’Origine Contrôlée) Calvados disparaît en Pays de Bray, faute de producteurs. C’est sans compter sur la ténacité du premier proviseur, Daniel André qui, pugnace et convaincant, réunit autour de lui des producteurs de pommes à cidre, remue ciel et terre, bouscule les politiques. L’INAO devra plier, mais impose une production de 50 hectolitres d’alcool pur par an destiné au Calvados. L’équivalent de 15 000 bouteilles au sein d’une région qui n’en produit plus! Une fois de plus la ferme du Domaine de Merval retrousse ses manches. L’Appellation est sauvée.
Et la Normande alors ?
Franchement, elle se porte bien. Je parle de la vache. Joli troupeau qui compte en 2020, 85 vaches laitières. Un bon lait riche, protéique et gras, idéal pour la transformation en Neufchâtel. Ajoutons quelques “nourrices” qui offrent leur lait à de jeunes “broutards” sous les pommiers. Belle image.
Tout herbe.
Depuis 2017, plus d’ensilage, plus de maïs. Notre culture, c’est l’herbe. Foin ou enrubannage (plus ou moins sec) un nouveau pari. Abandon du labour, mais tout est raisonné, réfléchi. Économie sur les temps de travaux et diminution des charges de mécanisation. La performance change de camp : moins de charges, moins de lait par vache, augmentation du prix des Neufchâtels = rentabilité accrue. Et travail sans stress, vraie valeur humaine ajoutée !
8 salariés sur 120 hectares.
En mettant en place cette agriculture raisonnable et respectueuse de l’environnement, en profitant de la situation bocagère, la ferme du domaine de Merval emploie 8 salariés. Fromagerie, élevage, cidrerie, culture de l’herbe. 8 salariés sur 120 hectares, une performance !
Financièrement autonome.
Contrairement à une idée reçue, les fermes de lycées fonctionnent sur budget propre : pas de financement “région” ni subvention : c’est le résultat d’exploitation qui finance les salaires et les amortissements. Comme une entreprise privée, nous avons des emprunts auprès des banques.
La région a financé les ateliers au démarrage, comme si nous avions “hérité” de la ferme, puis vogue la galère…
Et la pédagogie alors?
Depuis l’origine nos élèves s’instruisent à la ferme. Chaque semaine 2 élèves effectuent la traite et soins aux animaux, 2 autres sont le matin en fromagerie et suivent l’après-midi les travaux inhérents à la cidrerie ou aux vergers, encadrés par les salariés de la ferme.
Et par classes entières, ils viennent à la ferme en travaux pratiques avec leurs professeurs. Trop nombreux ? Pas de problème, les salariés de la ferme encadrent de petits groupes. Toujours dispos. Car salarié agricole au sein d’un lycée, c’est un vœu, une attente, une envie de partage avec la génération montante.
La ferme du Domaine est très ouverte à la pédagogie, depuis toujours, et accueille aussi des formations adultes et des élèves du lycée agricole d’Yvetot.
Des projets encore et encore.
2021 verra l’implantation sur 17 hectares d’un verger haute tige, dit traditionnel, avec des pommiers de plein vent, en agro – arbo -api foresterie. Donc, pommiers en variétés locales puisées dans le verger conservatoire, associés à des essences forestières (qui iront capter l’eau en profondeur) et mellifères, verger pâturé et cultures intermédiaires,
Nouvelle gamme de Calvados : non réduits, fûts uniques, fûts choisis.
Pommeau + de 10 ans.
Vinaigre balsamique.
Et la boutique.
Stéphanie, son sourire, sa bonne humeur et sa connaissance des produits vous accueille chaque vendredi de 10 h 30 à 18 heures. Dégustez nos Neufchâtels de 2 semaines ou 1 an, nos Calvados de 3 à 20 ans, nos “fûts choisis”, Pommeau, cidre et jus de pomme.
Les vins des lycées viticoles de France, gelées de pomme, confiture de lait et produits des fermes amies. Jolis choix, et beau parcours, non ?